Endurance
24 Heures du Mans : Ferrari, entre gloire et passion

24 HEURES DU MANS – Alors que la classique mancelle se tient le week-end prochain et fête cette année son Centenaire, Dicodusport vous fait découvrir chaque jour une marque qui a participé à la légende de l’épreuve sarthoise. Aujourd’hui, il est temps d’évoquer le mythe Ferrari. Absent pendant plus d’un demi-siècle, le constructeur italien revient cette année pour jouer les premiers rôles. Nous racontons son histoire.
Créées en 1923, les 24 Heures du Mans sont plus qu’une simple course d’endurance. Véritable laboratoire technique, l’épreuve née des intentions de Georges Durand, secrétaire général de l’ACO (Automobile Club de l’Ouest) et de Charles Faroux, patron du journal l’Auto, a toujours été pionnière en termes d’innovations. Des innovations qui, après avoir été testées en course, se sont retrouvées sur des voitures de séries destinées à la route, les nôtres.
Naissance du mythe et première victoire
Officiellement, l’entreprise Ferrari a été créée après la Seconde Guerre Mondiale. C’est en 1947 que la marque s’établit réellement. Avant cela, dès 1929, Enzo Ferrari, pilote automobile et industriel italien, avait entrepris la création de la Scuderia Ferrari. Celui qui pilote pour Alfa Romeo est chargé par le constructeur de missions qui ont trait au fonctionnement de l’équipe de course. Si Ferrari va rapidement devenir le bras droit d’Alfa Romeo avec la Scuderia, Enzo Ferrari souhaite rapidement prendre son indépendance.
C’est en 1948 que la Scuderia Ferrari fait ses débuts en Formule 1, deux ans avant la naissance du championnat du monde. Aux 24 Heures du Mans, l’écurie frappée du cheval cabré y participe pour la première fois en 1949, l’année qui marque la reprise de l’épreuve après une interruption de 10 ans suite au conflit mondial.
Engagées par des équipes privées, les deux 166 MM (Mille Miglia) connaissent des fortunes diverses. Si le prototype italien #23 abandonne, la #22 de Lord Selsdon et Luigi Chinetti l’emporte. Il s’agit de la toute première victoire de Ferrari aux 24 Heures du Mans, la troisième de Chinetti après ses deux succès sur Alfa Romeo en 1932 et 1934. Selon plusieurs sources fiables, l’Italo-Américain aurait piloté pendant 22h et 48 minutes. Impressionnant. Pour Ferrari, c’est le début d’une longue histoire d’amour avec Le Mans.
On the 26th June 1949 Luigi Chinetti claimed an overall victory in a Ferrari 166MM at the 24 Hours of Le Mans. #gtoengineering #ferrari #classicferrari #classiccars #drivetastefully #ferrari166mm #lemans #historicracing #otd pic.twitter.com/VfmNpTPoQm
— GTO Engineering (@GTO_Engineering) June 26, 2018
Contre Jaguar et Aston Martin, Ferrari ajoute deux victoires dans les années 1950
Jusqu’en 1953, Ferrari concourt au Mans toujours par le biais de concurrents privés. Cette année-là, la firme de Maranello s’engage officiellement sous son propre nom. La meilleur 340 MM termine l’épreuve à la 5ème place finale.
1954. L’équipe dirigée par Nello Ugolini aligne trois exemplaires de sa nouvelle et redoutable 375 Plus. Un duel se prépare entre Ferrari et Jaguar. Menant une grande partie de l’épreuve, le duo composé de Maurice Trintignant (oncle de l’acteur J.L Trintignant) et José Froilan Gonzales reste sous la menace de Jaguar, suite aux conditions pluvieuses qui perturbent l’épreuve et une mécanique qui fait des siennes en fin de course. Finalement, ces derniers résistent tant bien que mal au retour de la Britannique et s’impose avec 1:27 d’avance (écart le plus petit jusqu’en 1969).
(1/2) 1954 #Le_Mans_24_Hours
José Froilán González 🇦🇷 and Maurice Trintignant 🇫🇷
Scuderia Ferrari – Ferrari 375 Plus #4#classiccars pic.twitter.com/fgZk0MXc0N— Retr⭕mania (@Retromania4ever) May 27, 2023
Suite à ce succès qui est certainement l’un des plus beaux de la Scuderia, Ferrari n’arrive pas à confirmer dans l’immédiat. Délaissant son V12 au profit de moteurs 4 et 6 cylindres en ligne, avec des résultats décevants. Ainsi, en 1955, 1956 et 1957, Ferrari est battu par les Jaguar Type D à chaque fois. Et durant cette période de disette, il n’y a presque rien à retenir, si ce n’est la seule troisième place de la 625 LM de Trintignant-Gendebien en 1957.
1958. Ferrari fait évoluer son prototype. La version définitive de la 250 TR (Testa Rossa) apparaît en cette année qui se solde par un triomphe total. En plus du championnat du monde des voitures de sport remporté pour la cinquième fois en six ans après sa création en 1953, la marque d’Enzo Ferrari domine Jaguar et Aston Martin dans la Sarthe. Dans un remake de l’édition de 1954 et une pluie battante, la 250 TR #14 de Gendebien-Hill domine l’Aston Martin DB3 S #5 des frères Whitehead avec une avance confortable de 12 tours.
Un an plus tard, lors de l’édition 1959, Ferrari est annoncé comme le grand favori. Jaguar s’étant retiré, ne reste plus qu’Aston Martin. Plus véloces, les 250 TR se prennent les pieds dans le tapis et le constructeur britannique s’offre un doublé et son unique victoire aux 24 Heures du Mans grâce à la DBR-1 #5 emmenée par Roy Salvadori et Caroll Shelby.
L’apogée entre 1960 et 1965
À l’entame de cette nouvelle décennie, Ferrari fait toujours office de grand favori. La TR 59/60 #11 de Gendebien-Frère l’emporte devant la TR 60 #17 de Rodriguez-Pilette engagée par le NART (North American Racing Team). C’est le début d’une longue période de domination pour les bolides rouges.
1961. Sur les 11 Ferrari présentes, 5 sont inscrites en catégorie Sport. La lutte oppose les TR 61 officielles avec notamment la #17 du NART pilotée par les frères Rodriguez. Malgré l’abandon de cette dernière, Enzo Ferrari peut se rassurer : son écurie réalise un triplé, le premier de son histoire avec Gendebien-Hill aux commandes sur le prototype #10.
Le couvert est remis en 1962. Des évolutions sur la Scuderia sont apportées sur la Testa Rossa et la 330 TRI LM apparaît pour la première fois en compétition aux 24h du Mans, aux côtés des 250 TRI. Le duo Gendebien-Hill réédite son succès de l’an dernier. C’est un deuxième triplé de suite pour la firme de Maranello, une sixième victoire au général. Le Belge Olivier Gendebien, après un quatrième succès, se retire de l’endurance et du sport automobile.
Phil Hill / Olivier Gendebien, Ferrari 330 TRI / LM.
24 hours of Le Mans, 1962.
#Endurance #LeMans24 #Hill #Gendebien #Ferrari pic.twitter.com/bNCjMVdYz1— RSF Motorsport ® (@RSF_Motorsport) January 17, 2020
1963. Petite révolution, le V12 Columbo 3.0 litres est monté pour la première fois à l’arrière sur la 250 P, une création de Mauro Forghieri. Si elle n’est pas la plus charismatique des Ferrari, elle va offrir un septième scare au constructeur dans la Sarthe. Mieux, les Italiennes trustent les 6 premières places, Ludovico Scarfiotti et Lorenzo Bandini étant les lauréats sur la 250 P #21.
En 1964, une autre marque arrive dans la Sarthe pour contrecarrer les plans de Ferrari : Ford. En proie à des difficultés financières, l’écurie au cheval cabré ne cède pas aux avances d’Henry Ford II, qui avait envoyé une délégation en Europe au printemps 1963 pour le rachat de Ferrari, alors en difficulté financière. Tout semblait pourtant bien parti quand au dernier moment, Enzo Ferrari fait volteface en refusant catégoriquement d’abandonner son département compétition.
C’est donc en terre inconnue que les GT 40 débarquent au Mans en juin 1964 défier leur pire ennemi. Un public record se presse dans la Sarthe pour assister au premier round d’un duel qui n’est pas seulement d’ordre sportif, mais aussi politique, entre d’un côté la vieille Europe et de l’autre, la jeune Amérique qui souhaite conquérir le monde. Malgré une bonne vitesse de pointe, les trois prototypes américains ne voient pas l’arrivée. Nouveau triplé de Ferrari, avec la victoire de Vaccarella-Guichet sur la 275 P #20.
Une page se tourne fin 1965. Après une énième victoire et encore un triplé (oui oui) grâce aux 275 LM privées, Ford va prendre le relais de son illustre rival.
Nino Vaccarella – 24 Hours of Le Mans 1965 🇫🇷 –
NART #Ferrari 365 P2#oldschoolendurance pic.twitter.com/2U9xb4nouW— Luca (@Digione_79) December 11, 2019
Humilié par Ford en 1966 puis dominé par Porsche et Matra
L’heure de la revanche a sonné. Après deux échecs, Ford terrasse Ferrari lors de l’édition 1966. Et à l’inverse de 1964, cette fois, aucune auto d’Il Commendatore n’est à l’arrivée. Le revers de la médaille est difficile à encaisser. Ford signe son seul et unique triplé, la MK II #2 de McLaren-Amon devançant Miles-Hulme dans les circonstances que nous connaissons tous.
La 330 P4, dont la beauté est sans égal est dans la course en 1967. Mais finit par s’incliner face à la MK IV #1 de Gurney-Foyt.
En 1968 et 1969, il n’y a pas même pas de podium pour Ferrari qui a rangé au placard sa 330 P4 au profit des 275 LM vieillissantes. Et si Ford s’adjuge encore la timbale, Porsche se place désormais comme un prétendant légitime.
Justement, la firme de Stuttgart fait triompher sa 917 K avec Herrmann-Attwood en 1970. Ce sont trois Porsche qui monopolisent les trois places du podium. Pour Ferrari, cette année vire au cauchemar. Dès le début de course, vers 18h25, un incroyable accrochage met au tapis quatre 512. L’une des rescapées, celle du double vainqueur Jacky Ickx part en tête à queue à l’approche du virage Ford avant 2h du matin, puis fonce en marche arrière sur une butte de sable. Alors qu’il était deuxième de la course, certes loin du leader, le Belge doit renoncer.
Très loin du compte en 1971 et 1972, la Scuderia 312 PB peut croire en ses chances de victoire en 1973. Plus performantes que les Matra, les belles rouges sont pourtant encore victimes de défaillances. Et comme en 1967, au prix d’un beau duel avec le constructeur français, Ferrari repart avec les honneurs suite à la deuxième place décrochée par la #16 de Merzario-Pace.
Un demi-siècle plus tard, Ferrari de retour en Hypercar
En 1974, sous l’impulsion de son jeune patron de 25 ans Luca di Montezemolo, la Scuderia va totalement tourner le dos à l’endurance pour se concentrer sur la F1 en compagnie d’un pilote très prometteur en la personne de Niki Lauda.
50 ans plus tard, Ferrari s’apprête à effectuer son grand retour dans la Sarthe. La 499 P évolue depuis le début de saison en Championnat du monde d’endurance (WEC). Au bout de seulement trois courses, les résultats donnent pour le moment entière satisfaction. Avec trois podiums dont une deuxième place obtenue aux 6 Heures de Portimao, Ferrari est la principale menace de Toyota. La voir gagner dès cette année sur le double tour d’horloge ne paraît pas illusoire. Même s »il faudra pour cela réaliser une course parfaite, sans faute et possiblement d’attente selon la tournure des évènements.
Rolling out at Le Mans 😍@24hoursoflemans @FIAWEC #Ferrari499P #WEC #FerrariHypercar pic.twitter.com/NcdVM60qe8
— Ferrari Hypercar (@FerrariHypercar) June 4, 2023
Bien qu’il ne soit pas le constructeur comptabilisant le plus de succès au Mans avec « seulement » 9 victoires (Porsche et Audi en comptabilisent 19 et 13), Ferrari a marqué au fer rouge l’histoire des 24 Heures du Mans et de l’endurance en général en remportant 12 couronnes entre 1953 et 1972. Par sa renommée mondiale, son charme et ses nombreuses victoires, Ferrari n’en demeure pas moins un véritable mythe. L’un de ceux qui ont construit la légende de la plus mythique des courses automobiles du monde.
À lire aussi
- Le programme et les horaires des 24 Heures du Mans 2023
- Les engagés des 24 Heures du Mans 2023
- À quelle heure et sur quelle chaîne TV regarder les 24 Heures du Mans