Athlétisme
Athlétisme JO 2024 : Sasha Zhoya, le pari perdant de la FFA
ATHLÉTISME JO 2024 – Sasha Zhoya est passé à côté de ses JO sur 110 m haies, ne parvenant pas à se qualifier pour la finale. Mais son échec est celui de la FFA, qui a voulu propulser un athlète au lieu de miser sur plusieurs jeunes talents.
- À ce sujet – L’actualité des JO de Paris 2024
C’est peut-être l’échec le plus cuisant pour l’athlétisme français lors de ces Jeux Olympiques. Sasha Zhoya, présenté depuis 2019 comme le crack de l’athlétisme bleu blanc rouge, n’a même pas réussi à se qualifier pour la finale du 110 m haies. Éliminé dès le stade des demies. Une course avec trop de fautes et des illusions qui s’envolent. Alors que la FFA avait mis le paquet, dès 2019, sur le jeune athlète, la stratégie du all-in s’est avérée perdante. Pendant que d’autres athlètes olympiens ont dû effectuer une montée en puissance dans l’ombre, avec parfois très peu de moyens.
- À ce sujet – Palmarès et résultats athlétisme Paris 2024
La FFA a tout misé sur un gamin qui n’a que 22 ans en 2024
La stratégie du all-in peut clairement interroger quand on sait que l’athlétisme représente une multitude de disciplines, qui sont autant de chances de médailles. Plus de 100 médailles possibles à Paris, mais la Fédération décide de miser sur un jeune de 17 ans qui commence à faire parler de lui. Sasha Zhoya bat différents records du monde chez les cadets (lire plus bas). Et la presse s’affole. Notamment la presse française. Car il possède trois passeports. Français, zimbabwéen, et australien. L’Australie, là où il vit et où il est né. Rapidement, la France et l’Australie se disputent la pépite. La France aura le dernier mot début 2020. Zhoya rejoint les rangs de l’INSEP. Choix du cœur ? Pas forcément.
Dans le deal de belles conditions, un gros contrat avec Adidas, qui deviendra en 2022 l’équipementier des Bleus, après l’avoir historiquement été jusqu’en 2012. Adidas est très présent dans le monde de l’athlétisme. Des conditions, comme des allers-retours en Australie à sa guise. Sasha Zhoya est déjà traité comme une star alors que le palmarès ne suit pas encore (logique à 20 ans). Sa médiatisation est presque démesurée. Autant qu’un Kevin Mayer qui a tout gagné ou presque. Imaginez la pression sur les épaules d’un gamin que l’on veut comme sauveur d’un athlétisme français en grande difficulté depuis la fin des années 2010. Dans le documentaire Intérieur Sport de Canal+, et alors qu’il n’est pas encore entré dans la cour des grands, on sent déjà une certaine lassitude chez lui. Est-il vraiment heureux au fond de lui ? La question mérite d’être posée.
Aucune réelle progression depuis deux saisons et des athlètes qui le doublent
Si le Français est encore jeune (22 ans), on constate une réelle stagnation. Quand il a éclaté aux yeux du monde, en cadets, il a battu le record du monde du 110 m haies (haies à 91 cm), avec un chrono de 12.87. Mais aussi sur 60 m haies (7.48). Mais aussi le record du monde cadets de la perche, avec 5.56 m. Plus fort qu’Armand Duplantis au même âge. D’où les convoitises de plusieurs pays (lire plus haut). En juniors, il délaisse la perche, mais est tout aussi impressionnant sur les haies (passées à 99 cm). Un record du monde du 60 m haies (7.34). Mais surtout un record du monde stratosphérique, le jour de son sacre mondial à Nairobi, lors des Mondiaux juniors. Il pulvérise son propre record de plus d’un dixième (12.72).
🎮 @sasha_zhoya : CHEAT CODE !!!
RMJ🌍 110m🚧: 1️⃣2️⃣.7️⃣2️⃣
🔥🔥🔥🔥RMJ🌍 60m🚧: 7.34
RMC🌍 110m🚧: 12.87
RMC🌍 60m🚧: 7.482021 :
🥇CFJ🇫🇷 Bondoufle
🥇CEJ🇪🇺 Tallinn🇪🇪
🥇CMJ🌍 Nairobi🇰🇪 pic.twitter.com/xFyFmeHbOc— Samoudi 🎙🎥 (@SamyrHamoudi) August 21, 2021
Sa première année senior est probante. Un record porté à 13.17, pour sa première sur les haies à 1.06 m. De quoi être confiant. Il effectue ses premiers grands championnats, avec une demi-finale des Mondiaux de Eugene et une finale européenne. Là aussi, très probant. Sauf que, depuis, il n’a progressé que de deux centièmes. Pire encore, il n’a pas amélioré son record en 2024. À un âge où on est censé progresser.
L’erreur de la FFA est celle de ne pas avoir été capable de former une dizaine de médaillables potentiels
Toute l’avance prise en juniors s’est évaporée en espoirs. Sur certains de ses concurrents comme l’Italien Lorenzo Simonelli, qui a un record en 13.05 et déjà une médaille mondiale en salle et un sacre européen en extérieur, là où le Français n’a encore aucune distinction internationale et au mieux une 6e place des Mondiaux. Il a aussi perdu toute l’avance sur certains de ses ainés. À son âge, Ladji Doucouré courait 12.97 sur 110 m haies et était champion du monde de la distance. Pascal Martinot-Lagarde était médaillé de bronze mondial à 21 ans et battait le record de France à 23 ans (12.95). Et même sur la génération actuelle, Erwann Cinna, dans l’ombre de Sasha Zhoya, s’est rapproché à deux dixièmes, alors qu’il a un an de moins.
Néanmoins, ce serait absolument stupide de tirer à boulets rouges sur un gamin de 22 ans. Peut-être que la FFA a fait l’erreur de tout miser ou presque sur lui. Mais la vraie erreur de la FFA, est celle de ne pas mieux accompagner ses athlètes et de ne pas avoir été capable de former une dizaine de médaillables potentiels lors des JO. Sept ans que l’on sait que la France va accueillir les JO à domicile. Où l’on s’est présenté aux JO avec les seules Alexandra Tavernier et Mélina Robert-Michon qui ont décroché des médailles au niveau mondial et il y a près de 10 ans. En 2019, il y avait moyen de miser sur plus de jeunes, mieux dispatcher les forces. La pression était sans doute trop forte pour Sasha Zhoya. Qui reviendra sans doute plus fort. On le lui souhaite.
Sasha Zhoya était l’arbre médiatique qui cachait le désert de l’athlétisme français. Maintenant qu’il est tombé, on fait quoi ?
On s’accroche à CSM ou en commence le diagnostic ?Déçu pour lui, triste pour l’athlé français qui mérite mieux que ce qu’on lui offre.
— Théo Mazars (@MazarsTheo) August 7, 2024
1 Commentaire