Football
Milan – Inter : un match pour le titre et pour l’honneur

À San Siro ce dimanche 21 février se jouera un derby milanais sous haute tension. Ce Milan – Inter sentira la poudre puisqu’il pourrait s’avérer décisif dans la lutte pour le titre en Serie A.
Écosse ou Chine
Milan est une ville étrange. Centre financier et lieu de culte ; capitale de la mode et architecture tristounette ; irriguée de canaux et d’une sécheresse toute lombarde. Il suffit d’une matinée à Milan pour tout en saisir et à la fois pour n’y rien comprendre. Dans un pays que l’héritage et le passé hantent, Milan semble une exception normalisée, une ville qu’on pourrait aussi bien trouver en Écosse ou en Chine avec les mêmes avenues bordées des mêmes boutiques sur les mêmes trottoirs. N’étaient la Scalla et le Duomo.
Il est une tradition italienne que Milan a su préserver, celle du déchirement fratricide primordial et de la querelle de clocher occupationnelle. De Remus à Romulus à Peppone et Don Camillo, l’histoire de l’Italie est traversée de ces divisions de village. Le football n’y fait pas exception et par beaucoup cristallise ces tensions. Entre Milan et l’Inter c’est une question aussi de mépris et de classes. Comme entre le Torino et la Juventus ou la Roma et la Lazio, il en va du derby milanais comme du combat des Capulet contre les Montaigu.
Les fortunes désynchronisées de l’Inter et du Milan
Les deux clubs de Milan n’ont pas souvent connu des fortunes synchrones. À la fin des années 1980 toutefois, le Milan AC révolutionne le jeu grâce à Arrigo Sacchi pendant que le Trap réveille le vieil axe italo-allemand en recrutant Matthaüs et Brehme. Les Rossoneri sont réveillés depuis 1986 par un homme d’affaires sous UV et gomina. Silvio Berlusconi compte redonner au Milan AC le lustre qu’il admirait tant avec son père dans les tribunes de San Siro. Les Nerazzurri piquent quant à eux Giovanni Trapatonni à l’ennemi juventino pour sortir des places d’honneur et enfin doubler Turin et Naples.
En 1988-89 donc, l’Italie compte une concentration de talents hallucinante. Maradona, Van Basten, Gullit, Baresi, Maldini, Costacurta, Baggio, Brehme, Matthaüs, Serena… Tous ont leur place dans l’histoire du jeu et tous s’affrontent tous les week-ends entre Milan et Naples, entre Turin et Rome ou Florence et Pescara.
Trap l’Italien
L’Inter l’a mauvaise parce que non seulement son rival de Milan a remporté le Calcio 88 mais en plus, il lui a damé le pion dans le derby. Le Trap n’est pas du bois qu’on fait les flûtes ni des regrets qu’on fait les perdants. Le football d’Arrigo Sacchi et les leçons qu’il compte donner à tout le monde avec son marquage individuel et son pressing à tout crin émerveillent autant qu’ils agacent. Le coach de l’Inter n’est pas de ces élucubrations et s’appuie sur un bon vieux football italien qui lui a réussi à la Juve.
Il y a aussi que Giovanni Trapatonni, coach de l’Inter, a fait sa carrière de joueur au Milan AC. Milieu défensif rugueux, il est un élément essentiel du Grand Milan des années 1960. Devenu entraîneur, le Mister est vite évincé du banc rossonero. Que son Inter rencontre un autre Grand Milan, ce n’est donc pour lui pas tout à fait rien.
Le Grand Milan d’Arrigo Sacchi
Pour Arrigo Sacchi, l’Inter ou une autre équipe ne change pas les plans de son Milan. Jeu vers l’avant, pressing jusque dans les tribunes et deux centraux sans libero. L’année précédente, il a récolté les fruits en Serie A. Cette année, le Milan AC décide de passer la seconde et écrase la Coupe des Clubs champions de sa maîtrise. À la clef, trois matchs restés dans les mémoires. Deux demi-finales que Milan remporte contre le Real 6-1 score cumulé. La finale contre le Steuea Bucarest, vainqueur en 1986, 4-0 au Camp Nou.
À l’Inter, la Serie A et un record de points avec la victoire à deux points. Au Milan AC le règne européen et l’admiration de tous. En confrontation directe, l’Inter fait régner sa loi et bat son rossonero à San Siro.
L’Inter ou le Milan, pour qui sonne la Madonnina ?
Au sommet du Duomo siège une Vierge dorée aussi belle que petite. Une Madonnina censée protéger Milan comme Notre-Dame-de-la-Garde protège Marseille. Une Madonnina qui donne son nom au derby lombard qui se joue ce dimanche 21 février à 15h. En 1989, la Madonnina avait de quoi pavoiser et porter haut sa hallebarde. Son Inter gagne le meilleur championnat du monde ; son Milan est Roi d’Europe. De quelque côté qu’elle regarde, elle voit l’autre religion italienne gagner.
Pour au moins dix ans, les deux clubs lui donneront de quoi être fière. Aujourd’hui que l’Inter et le Milan AC se disputent de nouveau le championnat, on dit qu’elle porte la hallebarde un peu plus haut.
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