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Rugby à 7

Enjeux, équipes de France : Ce qu’il faut savoir sur les World Rugby Sevens Series

Valentin Mahey

Publié le

Enjeux, équipes de France Ce qu'il faut savoir sur les World Rugby Sevens Series
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World Rugby Sevens Series 2021/2022 C’est face à un destin souvent contraire que le circuit mondial de rugby à 7 a dû lutter pendant plus d’un an et demi. Après des reports à n’en plus finir, une simili-saison 2021 expédiée en deux tournois fin septembre (sans la majorité des meilleures équipes mondiales), la grand messe du Sevens s’apprête à être consacrée de nouveau, dès demain à Dubaï. Qu’attendre de cette saison et des équipes de France ?

Le programme

Tout n’est pas encore réglé, les restrictions privent encore la Nouvelle-Zélande et les Samoa d’une participation aux Emirats, mais l’on devrait couronner les champions en mai 2022 après neuf tournois masculins et six tournois féminins, avec retrait des pires résultats et relégation des derniers au classement. Les amateurs français auront rendez-vous à Toulouse en mai. Cap sur Le Cap ensuite, pour la Coupe du monde qui suivra en septembre.

Dans ce contexte encore perturbé, les tournois masculins mettent aux prises douze équipes (seize habituellement), et les tournois féminins dix (douze habituellement). La Grande-Bretagne laissera place aux différentes home nations à partir de janvier.

À Dubaï, le programme chargé pour les Bleues avec quatre matchs de poule sans droit à l’erreur (finales croisées selon le classement) contre l’Australie (Sam. 09h23) et les USA (Ve. 12h46), et, deux plus abordables contre l’Espagne (Ve. 06h10) et le Brésil (Ve. 09h12).

Poule à quatre pour les Bleus avec les champions olympiques Fidjiens (Ve. 08h22), l’Australie (Ve. 11h30) et le Canada (Ve. 15h35), et la possibilité de passer en quarts en tant que meilleur troisième.

Situations différentes mais objectif similaire pour les équipes de France

Fortunes diverses pour les deux sélections cet été. D’un côté ,l’équipe masculine qui a échoué à se qualifier pour Tokyo lors du TQO de Monaco (battue en finale par l’Irlande). De l’autre, l’équipe féminine, qui a non seulement réservé son ticket pour le Japon en Principauté, mais l’a surtout composté avec supplément argent olympique. Deux salles deux ambiances donc, d’autant que les logiques qui gouvernent chacune des sélections diffèrent : le contrat fédéral est un atout non-négligeable voire un Graal dans un rugby féminin encore largement amateur, il ne pèse en revanche pas lourd face aux sirènes du Top 14, voire des divisions inférieures chez les hommes.

Ceci explique sans doute le large renouvellement opéré chez les Bleus. Exit J-P Barraque (qui reviendra probablement le temps d’une tournée), Terry Bourahoua, Tavite Veredamu, P-G Lakafia, Sacha Valleau … place à de jeunes joueurs qui fourbissaient leurs armes dans l’ombre à l’image de Joachim Trouabal (21 ans), étincelant lors du récent Supersevens et fier rejeton de son père (Jean-Charles, ex-recordman du monde du 4x100m avec l’équipe de France), William Iraguha (23 ans), Jordan Sepho (22 ans) ou Varian Pasquet (22 ans).

Les cadres restants : Jonathan Laugel (2ème joueur français le plus capé en World Series), Stephen Parez (5ème) ou Paulin Riva apportent l’expérience et le liant nécessaire à la formation d’une équipe destinée à jouer l’or olympique à domicile. Marvin O’Connor, transfuge du contrat fédéral et joker médical à Clermont, est aussi présent – pour le côté expérience -, de même que l’attendu Nelson Epée (Toulouse), Alexandre Tchaptchet (Lyon) ou Rayan Rebbadj (Toulon) – pour l’aspect jeunesse.

Chez les Bleues, autre son de cloche. A l’exception notable de l’historique capitaine Fanny Horta, la totalité de l’équipe vice-championne olympique a rempilé. On notera tout de même l’absence ce week-end de Caroline Drouin et Chloé Jacquet, qui ont pris part aux trois matchs de la tournée d’automne victorieuse du XV de France, dans le cadre d’un double projet qui verra peut-être certaines joueuses doubler Coupe du monde à XV et à VII en fin d’année prochaine.

Pour illustrer l’expérience de l’équipe présente à Dubaï, une simple statistique suffit : huit des quinze Françaises les plus capées sur le circuit mondial composent l’effectif tricolore. Anne-Cécile Ciofani, nommée pour le titre de meilleure joueuse de l’année par World Rugby, est présente, tout comme Séraphine Okemba, Coralie Bertrand, Jade Ulutule ou Shanonn Izar. Certaines répondent à l’appel pour qui l’aventure tokyoïte a été ratée à peu de choses, à l’image de Joanna Grisez (blessée) ou Yolaine Yengo.

Bref, deux effectifs : l’un expérimenté, rodé aux matchs à enjeu, l’autre hybride, qui doit apprendre à se connaître face à l’adversité la plus coriace qui soit. Dans les deux cas, un objectif à long terme : Paris 2024, avec un premier examen dans un an au Cap.

Un duel Fidji – Afrique du Sud chez les hommes ?

Après avoir conservé leur titre olympique obtenu à Rio, les Fidji repartent en conquête. La Nouvelle-Zélande absente à Dubaï, c’est l’Afrique du Sud qui incarne probablement la plus grande menace pour les joueurs du Pacifique. Opposition de style(s) évidente au sommet. A la fois de par le mode de jeu ; les Fidjiens symbolisant à eux seuls le jeu à 7 tel qu’imaginé : fantaisies, offloads à gogo, utilisation du moindre millimètre d’espace, quand les Sud-Africains nous rappellent qu’il reste un rugby, avec son lot de rucks et de percussions frontales. De par les résultats aussi, les Fidji, irréguliers, se montrent toujours à la hauteur des grands rendez-vous, RDV systématiquement manqués, entre guillemets, par l’Afrique du Sud, malgré sa constance sur le circuit mondial.

Tiraillés entre les sirènes du Top 14 (Botitu, Wainiqolo, Tuimaba, voire Pro D2 pour Maqala), de la nouvelle franchise locale du Super Rugby, les Fijian Drua (Derenalagi, Bolaca) ou de la NRL (Masikau), l’effectif champion olympique à Tokyo a explosé. Revue d’effectif quasi-complète donc, mais habituelle néanmoins, le vivier local étant à même de renflouer inexorablement la sélection nationale sans perte de niveau, ou presque. L’unique inamovible Jerry Tuwai est absent (mariage), tandis que son équivalent sud-africain Branco du Preez est bien là pour encadrer un effectif relativement inchangé avec la présence des puissants JC Pretorius, Impi Visser, du détonateur Selvyn Davids ou de la pépite Ronald Brown, impressionnant au Japon cet été.

Outre ces deux équipes aux bases solides, l’Argentine sera à suivre avec intérêt. Bronzés aux JO en sortant l’Afrique du Sud à 6 contre 7, les coéquipiers de la révélation Marcos Moneta (absent ce week-end car retenu avec les Barbarians pour affronter les Samoa) ont le vent en poupe. Ce n’est pas forcément le cas de la Grande-Bretagne (présente en tant que Team GB seulement aux Emirats), qui fait sans les cadres anglais (Norton, Mitchell, Bibby) mais avec un fort accent écossais dans une période d’incertitude vis-à-vis de la viabilité des projets 7s au sein des différentes fédérations (notamment au Pays de Galles).

Ailleurs, le mot d’ordre semble être renouvellement, dans des proportions différentes. Les USA gardent huit de leurs Olympiens, dont les deux fusées Carlin Isles et Perry Baker qui ont allégrement dépassé la trentaine. Après des JO ratés, les Américains que certains voyaient dominer le circuit il y a quelques années, doivent relever la tête. Le Kenya a de son côté dit au-revoir à ses dinosaures Andrew Amonde (37 ans) et Collins Injera (2ème meilleur marqueur du circuit), tout en gardant l’ossature présente à Tokyo (7/13). L’Irlande se présente à Dubaï sans la flèche Jordan Conroy, qui avait fait tant de mal aux Français en juin, et la moitié des membres de son équipe olympique. C’est sans doute à l’Australie que revient la palme du coup de ménage puisque seuls quatre Tokyoïtes ont rallié les Emirats.

Pour le reste, le Canada, dont le rugby est en plein marasme, doit favoriser le retour sur investissement (il est vrai meilleur à 7 qu’à XV) et le Japon, extrêmement décevant à domicile et d’ores et déjà aux portes de la Coupe du monde (éliminé par la Corée du Sud et Hong-Kong), n’offre guère de perspectives réjouissantes. L’Espagne enfin, seule équipe absente du village olympique avec la France, a clairement pour objectif de maintenir sa place dans le gotha rugbystique mondial.

La saison des Bleues ?

Sans la Nouvelle-Zélande, la France hérite à Dubaï du statut de tête de série numéro 1. Un statut lourd à porter pour une équipe qui n’a encore jamais remporté le moindre titre en seulement trois finales, dont deux en Coupe du monde et aux JO ! Le retour des Black Ferns et ses stars (Portia Woodman a su montrer ses qualités dans la débandade néo-zélandaise à Pau et Castres) devrait ramener la France à une position d’outsider en janvier, mais ce week-end peut servir de confirmation à l’affirmation des Bleues comme force dominante du rugby à sept mondial.

En effet, les rapports de force historique se sont inversés au cours de la dernière olympiade. La position fragile du rugby union en Australie draine les talents hors de portée du 7, d’autant plus avec la professionnalisation de l’AFL ou de la NRL au féminin, à l’image d’Evania Pelite partie jouer aux Warriors de Wellington malgré ses deux aventures olympiques. La fin de la génération dorée (Parry, Tonegato, Green), marquée par l’échec japonais (5ème place) et le départ de ces joueuses replace l’Australie dans un paquet qu’elle avait l’habitude de dominer. C’est donc avec neuf U21 et les taulières Sharni Williams et Charlotte Caslick que les Green and Gold débarquent à Dubaï avec l’objectif de reconstruire.

Pour le Canada, bête noire historique des Françaises, ce sont les dissensions internes qui ont coulé le navire. Entre accusations de harcèlement vis-à-vis de l’entraineur en chef John Tait, limogé, règlements de compte de cour de récréation (Jamie Cudmore y allant de ses piques assassines sur fond de guerre des sexes), les Canucks ont chaviré à Tokyo, ne sortant même pas des poules. La capitaine Ghislaine Landry (meilleure marqueuse du circuit) est partie et l’apaisement viendra sans doute du terrain pour cette équipe et ce pays, place forte historique du rugby féminin.

De l’autre côté, les Fijdiennes ont enfin réussi à se mettre au diapason de leurs homologues masculins cet été. En ne cédant sur le fil que face aux Françaises en poule et aux Néo-Zélandaises en demi-finales (voire à l’arbitrage), les coéquipières de Reapi Ulinisau ont gagné leurs lettres de noblesse et peuvent légitimement faire peur en 2022. Leur victime lors du match pour la 3ème place, la Grande-Bretagne, est quant à elle sur courant alternatif. Très solide bien préparée (comme aux Jeux), en difficulté autrement, avec des investissements jugés trop légers pour exister au niveau mondial. Effectif revu à la jeunesse par rapport à juillet (5/13) et dernière occasion de voir l’ultra-véloce ailière galloise Jasmine Joyce en World Series cette saison (la GB redeviendra Angleterre en janvier).

Les USA restent une valeur sûre (Kelter, Tapper, Maher) malgré l’intégration de pas mal de sang neuf, idem pour la Russie qui garde la structure de l’équipe quart-de-finaliste olympique (Sozonova, Tiron, Khamidova).

L’Irlande et l’Espagne, privées de J.O, sont normalement un cran en-dessous malgré les belles impressions laissées par les Irlandaises en début d’année sur quelques tournois amicaux. C’est encore plus le cas pour le Brésil, qui profite de l’absence de la Chine sur le circuit pour continuer à se frotter aux grosses nations.

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