JO d'hiver Pékin 2022
JO Pékin 2022 Short-Track : Favoris, outsiders, Français

JO PÉKIN 2022 – SHORT-TRACK – Sport spectaculaire et propice aux surprises, le patinage de vitesse sur piste courte, plus communément appelé short-track, présentera neuf épreuves à Pékin dont le nouvellement créé relais mixte. Tour d’horizon des épreuves : favoris, outsiders, qu’attendre des patineurs français ?
Le short-track est sans doute l’objet du marronnier le plus célèbre et inévitable du grand cirque blanc olympique : la victoire de Steven Bradbury sur le 1 000m des J.O de Salt Lake City (2002). Une victoire inattendue qui tend à laisser à ce sport l’image d’une grande loterie sur patins, où le vainqueur n’est pas nécessairement le plus rapide mais bien le plus chanceux. C’est aller un peu vite en besogne tant la courte piste constitue un savant mélange entre puissance et maitrise inouïe de l’espace, chaque dépassement semblant presque suicidaire pour le néophyte. Et pourtant ils tournent …
Le short-track est-il donc un bingo glacé ? Jugeons plutôt des favoris des différentes épreuves, ceux dont la régularité en vient à faire mentir le mauvais sort et triompher l’art du dépassement. Sur les trois épreuves individuelles (500m, 1 000m, 1 500m), plusieurs noms se dégagent ; certains partout à la fois, d’autres plus spécialisés, le 500m faisant la part belle à la pure explosivité quand le 1 500m récompense les fins tacticiens les plus endurants. Au milieu de tout ça nos quatre Français, en quête d’une première breloque tricolore dans la discipline.
Cet état des lieux reste à prendre avec des pincettes dans la mesure où les dernières Coupe du monde ont eu lieu il y a près de deux mois, sans Championnats d’Europe ou des Quatre Continents (annulés).
Femmes : Suzanne Schulting grande star des J.O ?
Championne olympique du 1 000m en 2018 à 20 ans, la Néerlandaise s’avance à Pékin en tant que favorite à sa propre succession. Sa polyvalence – elle a remporté au moins une victoire sur chacune des distances cette saison – lui permet d’envisager d’inscrire son nom trois fois au palmarès, une performance réalisée par Wang Meng en 2006 et Kim Boutin en 2018 (mais sans victoire). Plus forte qu’en Corée, plus en maitrise, la Frisonne a les clés pour être la star des ces J.O.
Face à elle se dressent notamment les Coréennes Choi Min-Jeong et Lee Yubin. La première nommée est le symbole d’une équipe victorieuse mais pleine de dysfonctionnements. Elle avait ainsi été la cible de harcèlement de la part de sa coéquipière, Shim Suk-Hee, qui l’aurait délibérément fait chuter lors du 1 000m des J.O de Pyeongchang (Shim a été suspendue par la fédération coréenne). Néanmoins championne olympique en titre du 1 500m Choi a des arguments à faire valoir sur les plus longues distances. Il en va de même pour Lee, 20 ans, très en verve sur 1 500m, remportant deux étapes de Coupe du monde en début d’hiver.
Enfin, difficile de ne pas considérer comme favorite la championne olympique en titre du 500m, Arianna Fontana. A 31 ans l’Italienne vivra en Chine ses cinquièmes Jeux Olympiques, elle qui compte déjà huit médailles. Jamais sortie du top 2 en quatre Coupes du monde la Lombarde ne semble pas subir le poids des années.
Les Chinoises en embuscade
Sur 500m deux noms se détachaient du lot : Kim Boutin et Natalia Maliszewska. Malheureusement la Polonaise, qui aurait pu marquer l’histoire du sport dans son pays, a été testée positive au Covid et ratera donc, à minima, son épreuve fétiche. La Québecoise Boutin, recordwoman du monde, perd donc sa plus sérieuse concurrente au départ tant les deux patineuses écrasent le premier tour de course de par leur explosivité.
Les Canadiennes en règle générale seront à surveiller : qu’il s’agisse de la toute jeune Florence Brunelle (18 ans), ou de Courtney Sarault, unique non-Québécoise de la sélection. Les Pays-Bas pourront compter, outre Schulting, sur Xandra Velzeboer, très constante sur toutes les distances, ainsi que sur Selma Poutsma, qui avait représenté la France dans ses jeunes années.
Pour la Chine, historiquement ultra-dominante chez les femmes, les espoirs sont permis mais pas exorbitants. Fan Kexin, ancienne recordwoman du monde du 500m, n’a plus la faveur des pronostics et c’est plutôt sur Zhang Yuting (sur 1 000m et 1 500m) que l’Empire du Milieu va jeter son dévolu.
Notons aussi la montée en puissance de l’Américaine Kristen Santos, marquant le progressif retour au premier plan des USA dans la discipline. Celle-ci s’est imposée sur 1 000m à Nagoya.
Objectif finale pour Tifany Huot-Marchand
Du côté des Françaises, ambitions mesurées. La Belfortaine Tifany Huot-Marchand, pour ses deuxièmes J.O, s’avance en outsider pour une finale sur 1 500m. Constante dans le top 15 en Coupe du monde (deux fois 11ème, une fois 13ème) elle peut espérer se glisser parmi les grandes et rêver plus haut sur une distance qui l’a vue obtenir son premier podium individuel (à Dresde en 2019) et son meilleur résultat aux Championnats du monde (6ème à Montréal en 2018). Sur les autres courses, son manque d’explosivité risque de limiter la marge de manœuvre.
Pour la seconde tricolore, la néophyte Gwendoline Daudet, cela s’annonce plus difficile encore. « Bénéficiaire » de la grave blessure d’Aurélie Monvoisin, Daudet a sans doute pour objectif de franchir au moins un tour, probablement sur 1 000m où elle se montre ordinairement le plus à l’aise.
Short-track JO Pékin 2022 – Programme, résultats et médailles
Hommes : domination maison à Pékin ?
Difficile de discerner des favoris clairs et indiscutables du côté masculin tant la densité est élevée pour obtenir les premiers strapontins. Avec le surplus de motivation inhérent aux Jeux à domicile, le local Wu Daijing fait quand même figure d’homme à battre sur 500m. Ultra-spécialisé, recordman du monde, champion olympique en titre, Wu n’a pas été aussi souverain en Coupe du monde (une seule victoire), mais son standing parle pour lui.
S’il est assez peu probable de le voir briller sur les distances supérieures, il y sera suppléé avec brio par son coéquipier Ren Ziwei, impressionnant en décembre (deux victoires sur 1 500m, une sur 1 000m). De quoi offrir aux locaux l’espoir d’une razzia historique, car contrairement à leurs homologues féminines, les Chinois n’ont jamais vraiment brillé (leur seule médaille d’or étant celle mentionnée plus haut).
Une autre paire pourrait briller à Pékin, celle des frères Liu (Hongrie). De père chinois, Shaolin Sandor et Shoang avaient apporté la première médaille des J.O d’hiver à la Hongrie en 2018 (or sur le relais) et arrivent en Chine en quête de métal en individuel. Particulièrement en verve sur 500 et 1 000m (quatre podiums dont trois victoires à eux deux) les deux frères ont le vent en poupe.
Enfin impossible de dresser une liste de favoris sans faire la part belle à la Corée du Sud. En l’occurence Hwang Dae-Heon, médaillé à Pyeongchang à 18 ans, ou Park Jang-Hyuk, quand bien même les Coréens ne se sont pas montrés sous leur meilleur jour en Coupe du monde.
Pluie d’outsiders
Du côté des prétendants plusieurs pays présentent des candidats sérieux. A commencer par le Canada. Outre l’historique Charles Hamelin, 37 ans, médaillé olympique tous les quatre ans depuis Turin mais plus aussi souverain, le pays pourra compter sur Pascal Dion, vainqueur du classement général du 1 000m en Coupe du monde (3 podiums mais 0 victoire).
Les Pays-Bas forment un ensemble solide mais sans réel patineur sortant du lot. Ils compteront sur Itzhak de Laat et le leader Sjinkie Knegt, double médaillé olympique pas dans la forme de sa vie mais homme de championnat. Constat applicable également au Russe Semen Elistratov ou au néo-hongrois (ex-USA) John-Henry Krueger. Attention en outre au jeune Italien Pietro Sighel ou au Belge Stijn Desmet, qui s’entraîne avec l’équipe des Pays-Bas.
Deux Havrais pour rêver
Partenaires de club au Havre, Sébastien Lepape et Quentin Fercoq n’en sont pas au même point de leur carrière. A 31 ans le premier vivra ses troisièmes Jeux, le second ses premiers (hors J.O Jeunesse) à 22 ans. Lepape n’avait pas réussi à sortir du lot en 2014 et 2018, Pékin constitue sans doute sa dernière chance, un an après des Mondiaux ultra-réussis (4ème au général, vainqueur de la Super-finale sur 3000m qui n’offre pas de titre), chance qu’il jouera crânement sur toutes les distances avec plus d’espoir sur les courses tactiques. Sa saison de Coupe du monde l’a vu alterner hauts et bas, avec à la clé quatre tops 10 dont une quatrième place au 1 500m sur la piste des J.O
Pour Quentin Fercoq le but est sans doute de passer les tours, ce dont il est capable sur toutes les distances. N’ayant jamais atteint de finale sur le circuit mondial, se hisser jusqu’à ce niveau de compétition relèverait de l’exploit.
Les relais
La France ne sera présente que sur le nouvellement créé relais mixte (deux hommes et deux femmes) avec des chances réduites malgré un podium obtenu il y a quelques semaines (avec Aurélie Monvoisin). Les Chinois font office de favoris avec un quatuor très homogène sur un format de course court (2000m) privilégiant par exemple le profil de Wu Daijing. Les Pays-Bas devraient être leurs plus sérieux adversaires tandis que diverses nations peuvent légitimement s’inviter à la fête, la Corée du Sud, le Canada, la Russie ou la Hongrie malgré un duo féminin un peu en retrait.
Sur le relais féminin les Pays-Bas possèdent un ascendant certain. Avec trois victoires et une deuxième place, un record du monde (le leur) abaissé, les coéquipières de Suzanne Schulting tenteront de rendre hommage de la meilleure des manières à leur coéquipière Lara van Ruijven, membre du relais médaillé à Pyeongchang et tragiquement décédée à l’été 2020 lors d’un stage à Font-Romeu. Canadiennes, Chinoises et Italiennes devraient leur donner la réplique.
Sur le relais masculin les Hongrois arrivent avec un titre à défendre et les moyens de le faire même s’ils ne sont pas parvenus à remporter la moindre victoire en Coupe du monde. Les Canadiens, forts d’une grosse densité, ont été les plus à l’aise en décembre, au même titre que les Coréens. Les Chinois seront en embuscade comme les Néerlandais ou les Italiens.