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Football

Robert Louis-Dreyfus : vie et mort d’un aventurier (2/2)

Jordane Mougenot-Pelletier

Publié le

Robert Louis-Dreyfus : vie et mort d'un aventurier (2/2)
Abaca

L’Olympique de Marseille est toujours sous les feux des projecteurs que l’offre de rachat portée par Mourad Boudjellal a braqué sur lui. Avant que le club ne soit possession de Frank McCourt, l’OM a été la chasse gardée de Robert Louis-Dreyfus. Mais le connait-on vraiment ? Deuxième partie, Robert Louis-Dreyfus Président de club.

Mercato XXL

Saison 1995-1996, l’Olympique de Marseille peut remonter en D1. L’OM n’a pas le temps de boucler sa première saison de remontée dans l’élite que le club est racheté. Robert Louis-Dreyfus, qui compte toujours sur le sport professionnel pour faire progresser Adidas, a répondu à la proposition de Jean-Claude Gaudin et Renaud Muselier. Le tandem est alors à la tête d’un drôle d’attelage privé-public qui contrôle l’OM. RLD emporte la mise et en décembre 1996, il devient officiellement Président.

Et s’il laisse Gérard Gilli et son effectif finir la saison, RLD veut montrer très vite et à tout le monde qu’il n’est pas venu pour que l’OM reste un club comme les autres. Exit Gilli, Courbis débarque. Dans ses valises, arrivent Laurent Blanc, Claude Makélélé, Daniel Bravo et Fabrizio Ravanelli d’abord. Christophe Dugarry ensuite, revenu du FC Barcelone où Louis Van Gaal l’a fait jouer 10 matchs milieu défensif.

Idéal Standard

Rapidement, Robert Louis-Dreyfus a l’opportunité d’enfoncer le clou. Alors que son Olympique de Marseille se dispute les premières places du championnat de D1 avec Bordeaux, il répond à l’insistance de son ami Lucien d’Onofrio. Il tanne le Franco-Suisse de sauver le Standard de Liège de la faillite. RLD devient l’actionnaire majoritaire du club belge et place ses hommes à la direction du club.

En 1998, Robert Louis-Dreyfus est ainsi à la tête de deux clubs européens. Pour lui, c’est un pari puisqu’il s’agit de faire retrouver leur rang au plan national et continental à deux clubs prestigieux mais déchus. Et si les choses commencent bien du côté de Marseille qui est vice-champion de France et finaliste de la Coupe de l’UEFA lors de la saison 1998-1999, les choses vont progressivement se gâter pour les azurs et blancs. Sans Laurent Blanc, vendu à Manchester United pour satisfaire l’autorité de Courbis, le vestiaire marseillais se fissure. Dépourvu de patron de vestiaire et tiraillé par les éternelles tensions internes du club, l’OM va connaitre deux saisons en enfer consécutives en finissant 15e de D1. Pour le Standard, les résultats sont meilleurs mais les podiums succèdent au ventre mou et le club de la cité ardente est marron de titres.

L’autre partie de Louis-Dreyfus

En privé, une autre partie se joue pour Robert Louis-Dreyfus. Depuis les début des années 2000, l’homme se bat contre une leucémie qui l’éloigne de ses responsabilités sportives et de l’Europe. Il veut mettre toutes les chances de son côté et va se soigner aux Etats-Unis. Il délègue la direction de l’OM, d’abord à Yves Marchand, puis à Christophe Bouchet puis Pape Diouf. L’éloignement physique de RLD ne le protège toutefois pas de tout et en tout cas pas des tracas judiciaires. En 2006 et 2007, Robert Louis-Dreyfus, Rolland Courbis et Yves Marchand sont reconnus coupables d’avoir participé à un ensemble de malversations qui ont coûté la bagatelle de 22 millions d’euros au club.

Pour RLD, ce sont des faux et leur usage qui lui sont reprochés ainsi que des relations incestueuses entre l’OM et le Standard, en particulier des transferts surestimés. Pour les observateurs, c’est le signe d’une direction relâchée de l’homme d’affaires, bien plus (légitimement) préoccupé par ses problèmes médicaux.

A partir de 2004, il fait un retour fracassant dans le groupe familial. A force de négociations et grâce au soutien de Jacques Veyrat, Robert Louis-Dreyfus dispose en 2007 de 70% d’un groupe qui pèse plusieurs milliards de dollars de chiffre d’affaires. Pour le Président de l’OM, qui sait bien que ses années sont comptées, cette prise de pouvoir sonne comme un testament adressé à sa femme Margherita et ses trois enfants Eric, Maurice et Kyril.

Kachkar et Dubaï

A ce testament, Robert Louis-Dreyfus espère alors bien retirer le passif que commence à devenir l’Olympique de Marseille. Conspué en tribunes, lassé des millions investis sans retour sportif, le Franco-Suisse veut vendre le club. En 2007, il pense avoir trouvé le candidat idéal. Venu comme lui de l’industrie pharmaceutique, self-made-man syrien, Jack Kachkar est un ange tombé dans le jardin de Louis-Dreyfus. Il mise tout sur lui. Jusqu’à en faire son unique interlocuteur pour la vente du club et lui ouvrir la porte des vestiaires.

L’affaire dure trois mois jusqu’à ce que la supercherie soit découverte et que Jack Kachkar rime à Marseille avec lascar. Quelque temps plus tard, Robert Louis-Dreyfus refusera une offre sérieuse de rachat venant de Dubaï pour 100 millions d’euros. Il faut dire que dans le même temps, RLD a été bien inspiré de confier les rênes de l’OM à Pape Diouf qui lui a bien refait la cerise. Marseille est vice-champion de France en 2007 et 2009. Sur le plan financier, le club retrouve le solvabilité après laquelle il courait depuis 2001. Louis-Dreyfus monte le prix à 200 millions d’euros.

L’Olympique de Marseille, Robert Louis-Dreyfus n’aura pas l’occasion de le vendre. Il n’aura pas non plus l’occasion de récolter les lauriers des victoires marseillaises et liégeoises en championnat et en coupes qui finissent par s’enchaîner. En juillet 2009, Robert Louis-Dreyfus succombe des conséquences de sa leucémie.

Sa femme et héritière Margherita Louis-Dreyfus cherche rapidement à se séparer des deux clubs. En 2011, Roland Duchâtelet devient le nouvel actionnaire majoritaire du Standard. Cinq ans plus tard, c’est au tour de Frank McCourt d’acheter l’OM.

JMPPMJ

Journaliste/rédacteur depuis mai 2018 - Dans mon sang coule à la fois le feu des penne à l'arrabiata et la glace du Grand Colombier. Amoureux des belles lettres et des Talking Heads, je supporte un club olympique. Intéressé par les relations qu'entretient le sport avec la société, je m'intéresse autant à Marc Cécillon qu'à Pep Guardiola, à Tonya Harding qu'à Philipp Roth. Enfant des 90's, on ne me fera pas croire qu'il y a eu plus beau à voir depuis Zinédine Zidane, Marco Pantani et Pete Sampras. La béchamel est une invention du diable, la Super Ligue aussi.

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