Tour de France 2024
Vincent Barteau : « Tadej Pogacar est le favori »

TOUR DE FRANCE 2024 – Porteur du maillot jaune en 1984, Vincent Barteau regarde désormais le Tour de France derrière un micro, en étant consultant sur Sud Radio. Il sort également son livre « Complètement Barteau » (Éditions Solar, écrit avec Arnaud Ramsay) où il revient sur les anecdotes de sa carrière et porte son regard sur le cyclisme actuel. Pour Dicodusport, il analyse le Tour de France 2024 dont le départ sera donné ce samedi depuis Florence (Italie).
Que vous inspire le parcours du Tour de France ?
Que l’on parte d’Italie ou d’une autre ville, le Tour de France, c’est toujours trois semaines de combat. C’est LE grand rendez-vous des cyclistes dans le monde. Au niveau de la difficulté, ça reste toujours dur.
Est-ce un parcours avec des paysages que vous auriez aimé parcourir ?
J’aurais aimé ce Tour de France, mais, vous savez, je les ai tous aimés. On n’a pas vraiment le temps de profiter des paysages, mais on découvre des endroits quand même. Les difficultés sont pratiquement les mêmes chaque année. Il ne faut avoir aucun jour sans, être concentré pour au moins essayer de gagner une étape… C’est vraiment très nerveux pendant trois semaines. Quand tu regardes les étapes de montagne, les contre-la-montre, les arrivées aux sprints, il y a beaucoup de coureurs, mais il y a peu d’élus. Au maximum, il peut y avoir 21 vainqueurs, donc ce n’est pas évident de gagner.

Vous avez vécu le Tour de France 1989 avec ce contre-la-montre où votre coéquipier Laurent Fignon a perdu le maillot jaune pour neuf secondes face à Greg LeMond. Qu’est-ce que cela vous fait de voir à nouveau un contre-la-montre en conclusion du Tour ?
Malheureusement, Laurent Fillon a perdu ce jour-là, donc toute l’équipe a perdu. Mais moi, je suis partagé, car Greg LeMond était un ancien équipier et un très bon ami. Donc j’étais content qu’il gagne parce qu’il revenait de plusieurs années de galère après son accident de chasse. C’est vrai que ça va faire pratiquement 35 ans que le Tour de France ne s’est pas fini par un contre-la-montre. Si on a la chance que ce soit encore assez serré sur la dernière étape, il y aura un beau suspense.
Justement le suspense : existe-t-il vraiment ?
On ne sait pas trop où en est Jonas Vingegaard qui a été bien esquinté (lors de sa chute sur le Tour du Pays-Basque en avril dernier). Il s’est préparé à Tignes et je pense qu’à partir du moment où il prend le départ du Tour, c’est qu’il sent qu’il peut le gagner. Mais pour l’instant, on aurait tous tendance à donner un avantage à Tadej Pogačar qui a été impressionnant depuis le début de saison et qui a confirmé sur le Giro. C’est le favori. Mais encore une fois, on ne sait pas où en est Vingegaard ni Primož Roglič qui a changé d’équipe (de Visma-Lease a Bike à Red Bull Bora-Hansgrohe). Lui aussi a l’air de s’être très bien préparé et il a gagné le Dauphiné.
Vous avez roulé aux côtés d’Adrie van der Poel, de Patrick Evenepoel et de Henk van Aert. Quel est votre avis sur leur fils Mathieu van der Poel, Remco Evenepoel et Wout van Aert ?
Ils ont la classe ! Pour l’instant, Remco Evenepoel se dégage vraiment puisqu’il a gagné la Vuelta (en 2022), ce que n’ont pas fait Mathieu van der Poel et Wout van Aert. Mais Wout van Aert a été très impressionnant sur le Tour de France en travaillant pour Vingegaard. Il a été vraiment très costaud. Mathieu van der Poel est peut-être un peu moins routier que tout le monde sur un grand tour, mais sur les classiques, c’est le meilleur. Ce sont trois coureurs magnifiques qui ni ne calculent ni attendent : ils attaquent.
Et qu’attendre des Français ?
On attend une victoire finale depuis 1985 (Bernard Hinault). On a eu certes des podiums avec Romain Bardet (2e en 2016), Jean-Christophe Péraud (2e en 2014) et Thibaut Pinot (3e en 2014), mais on n’a jamais eu cette première place et à mon avis, elle ne va pas arriver tout de suite. En plus de ceux qu’on a cités (Vingegaard, Pogačar, Roglič, Evenepoel), il y a pas mal de jeunes coureurs étrangers qui arrivent comme Juan Ayuso d’UAE Emirates, Matteo Jorgenson chez Visma et qui sont plus forts que les Français actuellement, que ce soit Lenny Martinez ou Romain Grégoire. Ça va être compliqué pour encore quelques années et je pense que les Français devraient plutôt aller chercher les victoires d’étape que le général.

Romain Bardet va disputer son dernier Tour de France avant de prendre sa retraite l’année prochaine après le Dauphiné. Quel regard portez-vous sur sa carrière ?
Il a une belle carrière ! Faire deuxième du Tour de France, ce n’est pas rien. Il aura fait partie du gratin en France. Après, au bout d’un moment, il y a une fin. Avec l’âge, tout devient beaucoup plus difficile avec les jeunes qui poussent derrière.
L’Union Cycliste Internationale a mis en place de nouvelles règles sur la sécurité et notamment des cartons jaunes. Qu’en pensez-vous ?
C’est nul… et je n’approuve pas forcément. Il ferait mieux de se concentrer sur autre chose. C’est marrant d’essayer de faire ce genre de choses alors que tu les fais descendre à plus de 100 km/h, tu les fais traverser les villes avec tous les dos d’ânes, sans parler de tous les spectateurs qui sont sur le bord de la route. C’est là qu’il faut faire quelque chose.