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Endurance

24 Heures du Mans : Audi, l’âge d’or fantastique

Antoine Ancien

Publié le

24 Heures du Mans Audi, l'âge d'or fantastique
Photo Icon Sport

24 HEURES DU MANS – Alors que la mythique course d’endurance se tient le week-end prochain, Dicodusport vous fait découvrir chaque jour une marque qui a participé à la légende de l’épreuve sarthoise. Après Ford, Corvette et Pescarolo, il est l’heure de conter l’épopée d’Audi. Pendant 18 ans, la marque aux anneaux s’est imposée comme la référence en Sarthe et dans le monde du sport-prototype. Récit.

Créées en 1923, les 24 Heures du Mans sont plus qu’une simple course d’endurance. Véritable laboratoire technique, l’épreuve née des intentions de Georges Durand, secrétaire général de l’ACO (Automobile Club de l’Ouest) et de Charles Faroux, patron du journal l’Auto, a toujours été pionnière en termes d’innovations. Des innovations qui, après avoir été testées en course, se sont retrouvées sur des voitures de séries destinées à la route, les nôtres.

Une domination sans partage

Rarement, ces 20 dernières années, un constructeur aura autant marqué de son emprunte l’histoire de l’endurance et des 24h du Mans. Cette marque s’appelle Audi. Le département Audi Sport est créé en 1978. Dans le courant des années 1980, le constructeur allemand participe au Championnat du monde des rallyes, s’approprie deux titres constructeurs et remporte quatre fois consécutivement la course de côte américaine du Colorado, Pikes Peak, entre 1984 et 1987.

Audi change de dimension en 1999. Le constructeur, qui appartient au groupe Volkswagen, s’engage pour la première fois de son existence dans la catégorie des sports-prototypes et par la même occasion, aux 24h du Mans. Avec quatre autos, dont deux R8R et deux R8C, Audi ne peut pas espérer grand-chose dès sa première participation. Avec la présence de Toyota, BMW, Mercedes et Nissan, rivaliser d’entrée de jeu avec ces marques expérimentées relève du défi. Bien lui en prend, puisque les hommes de l’emblématique patron d’écurie, le Dr Wolfgang Ullrich, profitent des défaillances de leurs adversaires pour s’emparer du podium avec la troisième place de l’Audi R8R #8 de Pirro-Biela-Theys. Sa sœur, la R8R #7, finit juste derrière en quatrième position avec l’équipage Alboreto-Capello-Aiello.

L’an 2000 est marqué par le retrait de Toyota et BMW, préférant rejoindre la Formule 1 ainsi que de Mercedes et Nissan pour des raisons différentes. Face à une concurrence très rudimentaire, Audi n’a aucun mal à s’offrir un triplé avec la R8 de Biela-Kristensen-Pirro, qui devance ses deux voitures sœurs. C’est une performance historique, et le récital ne fait que commencer. La marque allemande s’adjuge un doublé en 2001, un nouveau triplé en 2002 et 2004. Le Danois Tom Kristensen, recordman du nombre de succès dans la Sarthe (9), est de la partie lors de chacune de ses victoires. Il s’impose même en 2003 sur une Bentley Speed 8, la marque britannique appartenant au même groupe qu’Audi et VW.

En 2004, mais encore davantage en 2005 et 2006, la marque aux anneaux est confrontée à un redoutable challenger du nom de Pescarolo. Moins rapides en 2005 que le team privé français (l’ACO a handicapé les LMP1 de plus de 50 kg et 10 litres de carburant en moins pour inciter les concurrents à construire de nouvelles voitures), les Audi doivent s’accrocher pour tenir le rythme en course. Des ennuis techniques viennent retarder considérablement Pescarolo, et permettent à la firme d’Ingolstadt de s’offrir un cinquième succès en six ans. Remarquable. Et qui d’autres que Kristensen, alias Monsieur Le Mans, pour l’emporter une sixième fois consécutive, une septième fois au total. Il est accompagné par ses équipiers Marco Werner et le Finlandais JJ Lehto.

2006 est une grande année. Audi lance sa toute nouvelle version, la R10 TDI (Turbo diesel injection) qui fera des merveilles sur le tracé manceau. La #8 du trio magique (un autre de plus) composé de Biela-Pirro-Werner domine Pescarolo. Tom Kristensen voit par la même occasion sa série de victoires d’affilée prendre fin, le Danois devant se contenter de la troisième place aux côtés de Rinaldo Capello et Allan McNish, son nouveau coéquipier. À partir de 2007, Audi est rejoint par Peugeot qui engage deux LMP1 la première année. La lionne est performante, mais Audi reste toujours plus fort et s’impose avec le même trio que l’année passée. En 2008, Peugeot est encore battue par la firme allemande, décidément intraitable au Mans. Cette fois, Kristensen récupère son bien avec l’Italien Capello et l’Écossais McNish, pour qui c’est la deuxième victoire dans la Sarthe, après son triomphe sur Porsche en 1998.

La donne change en 2009. La nouvelle R15 est moins fiable que la R10 et malgré un succès lors des 12h de Sebring (Floride), Audi est dominé dans son jardin par Peugeot qui s’impose avec la 908 HDI FAP. Avec l’abandon de la #2 sur une sortie de piste de Lucas Luhr et de nombreux pépins techniques rencontrés par la #3 qui ne terminera que 17ème, ne reste que la #1 du trio vainqueur en 2008 qui arrive à décrocher la troisième place.

Audi reprend sa couronne grâce à de nouvelles démonstrations de force

Revanchard, Audi bénéficie d’un manque de fiabilité des 908 HDI FAP en 2010 et renoue avec la victoire en s’adjugeant un triplé, le quatrième depuis 2000. À ce titre, les lauréats que sont Dumas-Bernhard-Rockenfeller établissent un record : celui de plus grande distance parcourue, 397 tours et 5 410,713 km en 24h. Le record tient toujours en 2022.

Après cette édition sans nulle autre pareille, la bande au Dr Ullrich ne passe pas loin de deux drames en 2011 avec la R18 Tdi. Alors qu’il allait prendre la tête de la course au terme de la première heure, Allan McNish s’accroche avec une Ferrari à la sortie de la passerelle Dunlop. Son auto s’écrase contre la pile de pneus et se retourne violemment. Le pilote écossais sort indemne de ce crash effroyable, sous les yeux humidifiés de son patron. Une autre Audi, la tenante en titre, frappe de point fouet le rail juste avant le virage de Mulsanne aux alentours de 23h. Son accrochage avec une autre Ferrari est spectaculaire, mais l’Allemand Mike Rockenfeller s’en sort miraculeusement. La seule représentante aux anneaux, la #2 de Fässler-Lotterer-Tréluyer, résiste au retour des Peugeot, dressées en meute et en chasse toute la course. Pour 13 petites secondes, Audi triomphe de nouveau, avec un nouveau trio. Sans doute l’une des plus belles victoires, si ce n’est la plus belle.

Les Allemands introduisent la technologie hybride en 2012. Peugeot s’étant retiré, Audi doit faire face à l’arrivée des Japonais de Toyota. Au volant de leur R18 e-tron-quattro, les vainqueurs de 2011 jouent les récidivistes. Cette année-là, Audi manque de peu le quadruplé (la marque avait engagé quatre autos), mais la R18 Ultra #3, émaillée par quelques soucis, est devancée par le team privé Rebellion. Quant aux Toyota, elles abandonnent toutes les deux. Mieux préparé, avec désormais un an d’expérience, le constructeur japonais se prépare pour la guerre en 2013. Mais une seule de leur auto parviendra à monter sur le podium, en deuxième position. L’Audi #2 de McNish-Duval-Kristensen mène la course parfaite pour s’assurer un succès mérité. C’est le 9ème et le dernier pour le Danois, véritable légende des 24h du Mans.

Mais ce n’est pas le dernier pour Audi, qui garnira son palmarès d’une 13ème et dernière victoire dans la Sarthe en 2014 et en concluant de la meilleure des façons : un doublé avec dans l’ordre, la #2 de Fässler-Lotterer-Tréluyer (troisième victoire en quatre ans pour cette équipage) qui précède la #1 de Duval-Kristensen-Di-Grassi. Toyota et Porsche, nouveau venu, devront attendre leur tour.

La fin d’une ère royale

En 2015 et 2016, les Audi, bien que performantes et au niveau, sont trop vite accablées de problèmes de fiabilité pour l’emporter. Porsche devancera donc son cousin à deux reprises, les hommes du directeur technique d’Audi Sport  Team Joest Ralff Jutner se contentant du troisième strapontin sur le podium.

Dans un communiqué en date du 26 octobre 2016, Audi annonce se retirer du WEC à l’issue de la saison. L’affaire du dieselgate et les coûts faramineux d’un programme LMP1 en endurance étant les principales motivations. Récemment, la marque aux anneaux avait émis son souhait de bâtir une toute nouvelle voiture, une LMDh (Le Mans Daytona Hypercar) qui s’engagerait en endurance en 2023, année centenaire des 24h du Mans. Il semblerait que le projet soit mort-né, l’envie de rejoindre la F1 dès 2026 étant plus forte.

Advienne ce qui adviendra. Audi, durant 18 longues années de présence, affiche des chiffres vertigineux : 13 victoires au Mans (deuxième constructeur le plus titré derrière Porsche) pour 18 podiums consécutifs. Ajoutez à cela deux titres de champion du monde d’endurance (WEC), constructeurs et pilotes en 2012 et 2013. Aucune autre marque ne peut se targuer d’avoir fait mieux en aussi peu de temps. Et coupons court à tout type de propos qui viendraient remettre en cause ce palmarès : Audi a su gagner quand il y avait très peu de concurrence, mais la firme d’Ingolstadt a confirmé son hégémonie lorsque Peugeot, Toyota et Porsche sont venus se mêler à la bataille. Il n’y a rien à redire, si ce n’est ce mot pour conclure : Dantesque.

Journaliste/rédacteur depuis mai 2021 - Coupe de monde de football, Roland-Garros, 24h du Mans autos...Qu'importe la compétition sportive, je vis le sport à chaque instant de l'année. Passionné depuis l'adolescence par son histoire, ses enjeux ainsi que par le milieu du journalisme, c'est en toute logique que j'ai décidé de rejoindre l'aventure Dicodusport. Mon but ? Vous transmettre ma fièvre sur chacune des disciplines.

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