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Cyclisme sur route 2024

Sur le Tour de Lombardie, Tadej Pogacar peut égaler Fausto Coppi

Théo Gripon Auer

Publié le

Sur le Tour de Lombardie, Tadej Pogacar peut égaler Fausto Coppi
Photo Icon Sport

TOUR DE LOMBARDIE 2024 – Entre Bergame et Côme, Tadej Pogacar sera le grand favori à sa propre succession. Avec le maillot de champion du monde sur les épaules, qu’il a déjà sublimé sur les routes du Tour d’Émilie, le Slovène pourrait remporter un quatrième Tour de Lombardie consécutif. Une prouesse jusque-là réalisée par un seul homme : Fausto Coppi.

Sept décennies séparent ces deux hommes et pourtant, la tactique appliquée n’a pas pris une ride. Une attaque dans l’une des dernières ascensions majeures, un écart à creuser dans les derniers kilomètres et une arrivée en solitaire ou en comité très restreint.

La stratégie imparable de Fausto Coppi

Le Campionissimo, lui, construisait toutes ses victoires dans l’ascension menant à la Madonna del Ghisallo. Un col de 9,3 km à 5,7 % de moyenne, dont la chapelle située à son sommet était située à une quarantaine de kilomètres de l’arrivée, jugée à cette époque à Milan.

Fausto Coppi plaçait une attaque décisive dans cette montée, distançait ses rivaux et creusait l’écart sur la route le menant à la cité lombarde. En 1946, 1947, 1948 et 1949, l’homme du Piémont franchissait la ligne d’arrivée en solitaire, comptant jusqu’à cinq minutes d’avance lors de la seconde de ses quatre victoires consécutives.

Fausto Coppi devenait le second quadruple vainqueur du Tour de Lombardie, après les quatre succès d’Alfredo Binda durant l’entre-deux-guerres (1925, 1926, 1927, 1931). Il s’offrira un cinquième bouquet en 1954, en s’imposant cette fois-ci au sprint à Milan, après n’avoir réussi à faire la différence dans les lacets de la Madonna del Ghisallo qu’il appréciait tant.



La Madonna del Ghisallo n’est plus aussi décisive, Tadej Pogacar mise sur de nouvelles difficultés

Si elle revêt toujours l’aspect mythique qui fit sa renommée, la montée menant vers la Madonna del Ghisallon’est plus l’ascension décisive qu’elle était auparavant. Les changements incessants de parcours ont bouleversé la place de cette difficulté sur le parcours. Désormais, la chapelle la plus populaire des cyclistes se situe à plus de 70 km de l’arrivée quand le Tour de Lombardie se termine à Côme les années paires, et en tout début de parcours lors des années impaires, lorsque le dernier Monument de la saison s’achève à Bergame. Loin, trop loin de l’arrivée pour que le Tour de Lombardie se gagne sur ses pentes.



Alors, Tadej Pogacar a jeté son dévolu sur de nouveaux sommets, sans pour autant s’éloigner de cette stratégie chère à Fausto Coppi, consistant à dynamiter la course dans l’ultime ascension majeure.

En 2021, pour sa première participation au Tour de Lombardie, le jeune Slovène de 23 ans suivait l’attaque de Vincenzo Nibali dans le Passo di Ganda. La dernière grosse difficulté du jour, dont son sommet était situé à une trentaine de kilomètres de l’arrivée. Seul en tête au moment d’attaquer la descente, Tadej Pogacar était rejoint par Fausto Masnada quelques kilomètres plus bas. Au sprint, il s’offrait son premier succès sur cette classique italienne.

L’année suivante, Pogacar lançait les hostilités dans le Civiglio, à 20 km de l’arrivée. Suivi par Enric Mas et rejoint par Mikel Landa dans la descente, ce dernier craquait dans l’ultime difficulté, laissant les deux fuyards s’expliquer au sprint. Plus puissant, Pogacar glanait sa seconde victoire consécutive.

En 2023, il profitait une nouvelle fois des pentes du Passo di Ganda pour passer à l’offensive, puis distancer tous ses rivaux dans la descente. Comme y parvenait Fausto Coppi, Pogacar s’imposait en solitaire à Bergame, en devançant d’une cinquantaine de secondes le groupe de chasse réglé au sprint par Andrea Bagioli.

Qui peut priver Tadej Pogacar d’un quatrième succès ?

2021, 2022, 2023, et désormais 2024 ? En cas de succès sur le Tour de Lombardie, Tadej Pogacar égalerait la performance de Fausto Coppi qui, coïncidence, avait glané sa quatrième victoire en 1949, l’année de son doublé Giro – Tour de France. Il devenait, au passage, le premier coureur à remporter ces deux Grands Tours la même année.

Quitte à pousser la symbolique jusqu’à son paroxysme et rouler sur les traces de son illustre prédécesseur, Tadej Pogacar pourrait bien être tenté de dynamiter la course dès les pentes menant à la Madonna del Ghisallo, comme le faisait Fausto Coppi, il y a trois quarts de siècle. Coutumier des exploits en solitaire, le nouveau champion du monde a glané ses cinq bandes arc-en-ciel après avoir attaqué à plus de 100 km de l’arrivée. Sur l’édition 2024 du dernier Monument de la saison, le sommet de la Madonna del Ghisallo se trouve à 78 km de l’arrivée. Presque une formalité pour le coureur Slovène, que plus personne n’ose suivre lorsqu’il s’élance de si loin.

Seul au monde, Pogacar le sera, sans doute, à nouveau ce samedi. Après le récent forfait de Primoz Roglic, Remco Evenepoel semble être le seul en mesure de suivre la roue du Slovène, à condition que le champion olympique en titre soit dans une forme étincelante, digne de celle qui l’avait propulsé au sommet de l’Olympe dans les rues de Paris. Derrière, Enric Mas pourrait faire parler ses qualités de grimpeur, David Gaudu peut surfer sur son excellente forme affichée depuis la Vuelta et Romain Bardet aimerait marquer le dernier Tour de Lombardie de sa carrière d’une pierre blanche. Mais ces ambitions seront-elles à la hauteur du phénomène Pogacar ?

Finalement, la principale menace pour le nouveau champion du monde ne viendrait-elle pas de lui-même ? De cette irrépressible envie de marquer l’histoire du cyclisme à coup d’exploits toujours plus grands. D’attaques en solitaire toujours plus lointaines, au risque de tutoyer ses limites physiques et perdre pied dans les derniers kilomètres. D’un engagement un peu trop conséquent dans une descente, et d’une roue qui s’échappe sur une chaussée qui pourrait être humide ce samedi.

Après une saison record où il a presque tout gagné, Tadej Pogacar souhaite marquer de son empreinte cette nouvelle édition du Tour de Lombardie, c’est certain. Mais pour espérer égaler Fausto Coppi, le Slovène devra peut-être se montrer moins tempétueux.

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