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Richard Gasquet : « J’ai beaucoup de fierté par rapport à ma carrière, je le mesure encore plus aujourd’hui »

Tom Compayrot

Publié le

Richard Gasquet « J'ai beaucoup de fierté par rapport à ma carrière, je le mesure encore plus aujourd’hui »
Photo Icon Sport

ATP CHALLENGER 2024 – Richard Gasquet est en lice cette semaine au Challenger 75 de Murcie sur terre battue, où il est tête de série n°2. Avant de jouer son quart de finale ce vendredi, l’ex-n°7 mondial s’est confié au micro de Dicodusport, présent sur place. L’occasion de prendre du recul sur sa carrière, à l’heure où il est retombé en dehors du Top 100 et doit désormais cravacher sur le circuit secondaire.

Pour commencer Richard, quelles sont tes sensations ici à Murcie ?

Hier, j’ai pas mal joué [victoire 6-3, 4-6, 6-0 au deuxième tour, contre l’Italien Samuel Vincent Ruggeri, n°290 mondial]. Après, il y a eu trois sets, ça n’a pas été évident. Je vais me préparer sur ces tournois-là pour essayer de faire quelque chose sur les gros tournois qui arrivent après. Comme j’ai fait à Doha où je bats un mec qui était quand même 45e mondial [Alexander Shevchenko]. Je vais y aller avec de l’humilité. Mais j’essaye surtout de me faire plaisir, c’est le principal.

Maintenant que tu es 120e mondial, arrives-tu à retrouver de la motivation pour jouer des modestes tournois comme celui-ci, alors que tu as passé toute ta carrière à jouer tous les plus gros tournois ?

Forcément, c’est toujours mieux de jouer Rome, Monaco et Madrid, et des tableaux finaux que j’ai toujours joués… Mais bon, je suis 120e mondial aujourd’hui. Je prépare quand même des gros tournois : j’ai une wild-card à Bucarest [ATP 250 en avril], peut-être à Roland-Garros aussi… Il reste tout de même des gros tournois derrière, donc si je veux les préparer et jouer, je n’ai pas le choix que de venir ici. Je n’ai pas voulu faire la tournée aux États-Unis pour jouer les qualifications de Miami etc. Je me suis dit que j’allais me préparer sur terre battue ici. Mais oui ce n’est pas évident, tous les matchs sont compliqués. Mais si je n’ai pas l’humilité pour, autant arrêter le tennis. Donc ce n’est pas un souci pour moi d’être ici. Ce qui est difficile, c’est que je n’ai pas de marge sur beaucoup de joueurs. Tous les matchs sont compliqués, il faut que je m’accroche fort pour gagner.

La notion de plaisir est-elle importante pour toi ? C’est ce qui te fait continuer à jouer à 37 ans ?

Oui, j’ai toujours ce plaisir. J’ai eu du plaisir à jouer Alcaraz à l’Open Australie [défaite 7-6, 6-1, 6-2 au premier tour], à être à Montpellier, à Marseille… J’aurais aimé gagner plus de matchs, mais je ne changerai pas ce début d’année. Après, je suis allé au Moyen-Orient et ça ne s’est pas si mal passé. Donc oui, j’ai pris du plaisir sur ce début d’année. En tout cas la saison est longue, je vais faire le maximum pour revenir dans les 100, même si ce n’est pas facile parce qu’il faut gagner beaucoup de matchs.



Pour prendre un exemple parlant : Tommy Robredo, ancien n°5 mondial, a continué à jouer jusqu’à quasiment 40 ans alors qu’il était au-delà de la 300e place mondiale. Est-ce que tu te vois prendre une trajectoire similaire ?

Non, moi je ne continuerai pas jusqu’à 40 ans. Lui était plus bas que moi. Je pense qu’il faut s’avoir s’arrêter. Si tu es 100e mondial ça va, mais si tu es 300e à 40 ans ça n’a plus aucun intérêt. Après chacun fait ce qu’il veut, s’il décrétait qu’il avait envie, libre à lui. Personne n’a à critiquer ou approuver son choix, ça a été un grand joueur Robredo.



Penses-tu que tes adversaires dans des tournois Challenger ont une motivation supplémentaire à te battre, sachant que tu es quand même un gros nom du circuit ?

Oui, forcément, ils ont une motivation autre quand ils me jouent. Contre celui d’hier par exemple, il a fallu que je sois humble pour gagner parce qu’il jouait très bien. Il a fallu que je m’accroche. C’est dur quoi, c’est ce qui change par rapport à avant. Quand j’étais dans les meilleurs, j’avais une marge sur des joueurs comme ça. Aujourd’hui, j’en ai peu, je peux perdre contre n’importe qui.

Justement, que penses-tu de l’évolution des circuits secondaires et du niveau global des joueurs, par rapport à tes débuts ?

Je ne me souviens plus trop. Ça fait 20-22 ans, c’est dur de se rappeler. Mais je pense que oui, un joueur qui est 200 ou 300e aujourd’hui est plus fort qu’avant. Pas dans les 10 premiers parce qu’il y avait Nadal, Federer, Djokovic, Murray, Wawrinka… Ça va être dur d’avoir une ère aussi forte. Mais ce qui est certain, c’est qu’un joueur 150 ou 200e est meilleur qu’avant car mieux préparé et plus sérieux. C’est sûr.

Récemment, tu es retombé en dehors du top 100 pour la première fois depuis 18 ans. Ça a été compliqué pour toi mentalement, ou ça ne t’a pas dérangé plus que ça ?

Mentalement, ça ne m’a pas fait marrer, mais je savais que ça allait arriver un jour ou l’autre. Après, c’est à moi de démontrer que j’ai encore le niveau pour être top 100. Le jouer c’est quelque chose, mais y remonter c’est autre chose, parce qu’il faut gagner beaucoup de matchs. Mais j’ai déjà retardé cette sortie le mieux possible. Je pensais en sortir beaucoup plus tôt qu’à presque 38 ans. Donc c’est déjà une énorme réussite.

Ton premier match professionnel était en 2001 à Marseille. Quand tu regardes derrière toi, quel regard portes-tu sur ta carrière, sur tout ce que tu as fait depuis ce jour-là ? De la fierté, j’imagine ?

Oui, beaucoup de fierté, parce que c’est dur quoi. Je le mesure encore plus aujourd’hui parce que je suis plus conscient des résultats, de la compétition. À l’époque, je gagnais beaucoup de matchs, donc je m’en rendais moins compte. Aujourd’hui, je mesure mieux ce que c’est de faire 22 ans toutes les semaines sur le circuit, avec des victoires, des défaites, des mecs qui veulent te battre… Le tennis est très compétitif, ce n’est quand même pas facile d’avoir une carrière comme ça.

Qu’est-ce que ça t’a fait d’avoir vu certains de ta génération arrêter avant toi ? Je pense à Jo-Wilfried Tsonga et Gilles Simon bien sûr, et même Rafael Nadal qui est sur la fin…

Oui, quand Jo a arrêté, ça m’a fait un peu bizarre. Gilles aussi. Pas Federer parce que ce n’est pas ma génération, il avait cinq ans de plus. Là, si Murray, Wawrinka et surtout Nadal arrêtent, ça va me faire mal. Et ça ne va pas tarder, je pense. C’est une question de mois pour à peu près tous ces joueurs. Moi y compris, même si j’essaye de ne pas me poser la question, justement pour être frais dans la tête et ne pas penser à ça tout le temps. J’essaye de jouer sans réfléchir au moment de la fin.

Est-ce que tu te fixes encore des objectifs de classement aujourd’hui ?

J’aimerais bien remonter dans les 100 premiers, mais bon, ce n’est pas facile quand même. Il faut jouer beaucoup de matchs, ce n’est pas évident. Mais comme je t’ai dit, j’ai plaisir à jouer. J’ai malgré tout vécu des bons moments cette année, même si je suis moins fort. Je ne regrette pas du tout d’avoir continué. Quand je gagne ici hier, je prends du plaisir même si ce n’est pas le plus grand tournoi du monde. J’essaye de rester en forme pour essayer d’encore faire quelques bons matchs.

Journaliste/rédacteur depuis mars 2017 - Amoureux de la petite balle jaune et du gros ballon orange qui traîne sa carcasse sur Dicodusport depuis 2017. Rafael Nadal et LeBron James sont les meilleurs joueurs de l'histoire.

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